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Livre "Folle de Bassan" : La mer réclame votre attention

Livre "Folle de Bassan" : La mer réclame votre attention

Mayday[1]

2 novembre 1985. Il est 17H25, je m’élance pour une traversée de l’Atlantique en solitaire, sans assistance et sans radio. Une idée folle, dont le film coproduit avec Antenne 2 qui retrace cette aventure, remporta l’ancre de Bronze au Festival du film de la mer.  

Sous une plume intime et personnelle,  paraitra  en décembre, le livre "Folle de Bassan", aux éditions Nautilus. Voici ce qui aurait pu l'épilogue du livre, mais nous lui avons préféré une fin plus poétique... Voici donc cet épilogue N°2, un peu plombant, certes, mais plus utile, si vous pensez qu’il est utile des rester informé et d’agir en faveur des océans. Ces lignes sont destinées à vous embarquer dans mon sillage !

Au fur et à mesure de l’écriture de mon livre Folle de Bassan, qui retrace ma traversée de l’Atlantique en solitaire, sans assistance et sans radio, je me suis rendue compte, en constatant l’état de notre planète bleue que cette aventure réalisée il y a 35 ans, me semblait avoir un siècle !

Une image forte s’est imposée à moi, celle d’un super tanker lancé à grande vitesse avec à bord sept milliards de victimes consentantes filant droit sur les écueils. Sur ce bateau, j’y suis et vous y êtes à mes côtés. Nos enfants y sont aussi… Mais nous pouvons agir ! Voici quelques pistes :

Et si nous faisions un point avant de continuer notre course folle ?

Les lignes qui suivent risquent de manquer de légèreté, je m’en excuse par avance, mais j’espère que vous aurez le courage de poursuivre ;-). Vous y trouverez aussi de bonnes nouvelles et quelques pistes pour faire votre part. Car bien sûr, personne n’a le pouvoir de changer le monde, mais ensemble nous pouvons contribuer à le rendre meilleur.

Après des siècles d’exploration, l’homo sapiens a fini par atteindre tous les confins de la terre. Nous filons droit vers la sixième extinction de masse. Un million d’espèces végétales et animales sont actuellement menacées. Dans l’histoire de l’humanité, une telle hécatombe ne s’était jamais produite. 

Les scientifiques le savent : il n’est pas possible d’imaginer notre futur sans biodiversité. Plus de quinze mille études et documents officiels[2] dressent le bilan mondial des cinquante dernières années. Compte tenu de l’interdépendance du vivant, il s’agit de gagner ou perdre, tous ensemble… Huit milliards sur ce supertanker…

Les scientifiques évoquent des faisceaux synergiques de causes qui sont la conséquence directe de l’activité humaine. Ils citent trois causes principales :

  • l’augmentation de la population : Les politiques et les économistes, les religieux nous exhortent à nous multiplier, ne serait-ce que pour assurer les systèmes de retraite. Ce qui nous sauve à court terme nous condamne à moyen terme… Heureusement, la baisse démographique s’annonce d’ici vingt ans
  • l’augmentation de la consommation par habitant ; 80 % des ressources sont consommées par les 20 % des plus riches : une chance pour la planète, il y‘a encore beaucoup de pauvres… Ouf !
  • l’innovation technologique : Elle crée de grandes avancées, mais vers quel futur ?

 

La bonne nouvelle cependant, c’est que si nous sommes à l’origine du problème, nous en sommes aussi la solution !

 

La Terre

Quelle drôle d’idée de l’appeler ainsi alors que 71 % de la planète est recouverte d’eau… Voilà une belle démonstration de notre incompréhension des enjeux actuels. Les océans retiennent 93 % du CO2 et produisent 50 % de l’oxygène que nous respirons grâce à un peuple invisible qui représente 95 % de la biomasse : le plancton !

Ces micro-organismes sont de plus en plus affectés par les changements climatiques. Les spécialistes s’interrogent sur leur vulnérabilité et leur capacité d’adaptation face à l’accélération des mutations. Vous l’aurez compris, c’est de notre propre vulnérabilité dont il s’agit avant tout… L’augmentation de la température des océans stresse le corail, base de la chaîne alimentaire. 33 % des récifs coralliens ont déjà disparu. 90 % pourraient avoir disparu d’ici à 2050. La pêche industrielle est la plus grande menace pour ces récifs qui se nourrissent des excréments des poissons. Ici et là des initiatives voient le jour, comme Coral Gardener est une association née d'un petit groupe de jeunes polynésiens qui souhaitaient lutter contre la dégradation rapide de leur récif local à Mo'orea, en Polynésie française. En 2023, leur grand objectif est de planter un million de coraux dans le monde, et de démontrer l’efficacité de leur approche.

Pèche à gogo

Depuis 1970, ont disparu :

  • 99 % des flétans
  • 99 % des aiglefins
  • 97 % des thons rouges

Pourtant les grandes espèces comme les petites, par leurs mouvements et leurs déplacements, amènent le carbone au fond de l’océan et participent ainsi à la stabilité du milieu… Aïe ! Vous aurez peut-être du mal à commander votre prochain sushi au thon… Comment rester complice d’un braconnage à grande échelle tuant 5 millions de poissons chaque minute, sachant que chaque poisson joue un rôle dans son écosystème et crée ce brassage indispensable à la biologie marine en contribuant au refroidissement des océans[3] ?

 

Les progrès technologiques ont permis d’industrialiser la pêche : 4 600 000 bateaux exterminateurs raflent toute la vie des océans. Ces chalutiers détruisent tout sur leur passage trainant des filets de 20 à 55 km de long qui finissent en filets fantômes. Ces puissants abattoirs flottants dévastent 1,5 milliard de kilomètres carrés de forêts marines chaque année, c’est-à-dire l’équivalent d’une surface comme la Norvège, le Groenland, la Suède, la Finlande, le Danemark, le Royaume uni, la France, l’Allemagne, le Portugal, la Turquie, l’Iran, la Thaïlande et l’Australie réunis ! Pourtant à surface égale, les herbes aquatiques absorbent 20 fois plus de carbone que les forêts.

La pêche durable pourrait-elle nous apporter une lueur d’espoir et nous permettre de déguster un petit carpaccio de poisson sans culpabilité ? Sylvia Earles[4] et bien d’autres experts l’évoquent : la pêche durable n’existe pas, pas plus que le contrôle en mer. Comment savoir si un poisson est pêché durablement ? MSC, le plus grand label de pêche durable qui figure sur les boîtes de thon, ne vise qu’à déculpabiliser le consommateur. D’ailleurs, l’un de ses fondateurs n’est autre que la multinationale Unilever… Compte tenu des intérêts colossaux en jeu, les observateurs sont menacés, disparus en mer ou abattus de sang-froid[5]. La pêche en Asie est aux mains de groupes criminels qui pratiquent l’esclavage pour réduire les coûts d’une industrie de moins en moins rentable, faute de poissons. 35 milliards de dollars subventionnent les flottes industrielles du monde qui pillent les ressources des petits pêcheurs locaux en pirogue d’Afrique de l’Ouest.

En 2050, la pêche commerciale n’existera plus faute d’avoir suffisamment de poissons à attraper. Ceci serait presque une bonne nouvelle, si la mer et nous-mêmes n’avions pas besoin de ses poissons… D’ailleurs, l’économie de l’extinction se met déjà en place. En 2013, un thon rouge de 222 kilos a été vendu 1,38 million d’euros à Tokyo. Un record ! Qu’à cela ne tienne, Mitsubishi et d’autres entreprises achètent et parient sur la valorisation d’une nouvelle matière première qui se raréfie, stockée dans d’immenses congélateurs. Le nouvel or gris bleuté ?

Qu’importe, il nous reste bien le saumon d’élevage pour décorer nos sushis ! Pourtant, nourris à base de farine et d’huile de poisson, il faut plus de poissons sauvages pour produire un poisson d’élevage que de manger du poisson sauvage directement ! En Écosse, les élevages produisent chaque année, autant de déchets organiques que toute la population écossaise réunie. Jamais maltraitance animale n’a généré une telle surmortalité : 50 % des saumons d’élevage meurent d’anémie, de chlamydiae, d’infestations de poux ou de maladies cardiaques avant même d’avoir été pêchés ! Cette maltraitance ne suscite que peu d’empathie pour ces bestioles qui restent muettes comme des carpes.

 

Quelques petits gestes pour que les océans restent en vie :

La réponse qu’apporta un spécialiste dans un documentaire me déconcerta par sa simplicité : cesser de manger la mer !

Mais pour ceux qui trouveraient cette position trop radicale vous pourriez déjà :

  • Consommer du poisson de ligne et boycotter le poisson chaluté
  • Délaisser les poissons d’élevage
  • Réduire votre consommation de poisson actuellement de 20 kgs par an/habitant
  • Informer vos amis, vos proches (sans chercher à les convaincre, car vous susciteriez des réactions de rejet contraires à celles attendues)
  • Soutenir des associations[6] comme :
    • celle de Sea Shepherd qui lutte contre l’extermination des baleines, des phoques et contre la pêche industrielle https://seashepherd.fr
    • Ocean Conservancy : recherche scientifique pour développer des technologies de préservation des océans https://oceanconservancy.org
  • 4myplanet : aide à la préservation de l’Océan par des missions pédagogiques concrètes https://4myplanet.fr

 

 

D’ailleurs, cette décision serait bénéfique à votre santé car cela pourrait vous épargner d’ingérer du mercure et autres métaux lourds.  D’ailleurs l'Agence canadienne d'inspection des aliments - ACIA - conseille de « limiter à un repas par semaine la consommation d'espadon, de requin ou de thon frais. Pour les jeunes enfants, les femmes en âge de procréer, la limite recommandée est d'un repas par mois ».

Ne plus manger de poissons pourrait aussi vous éviter d’avaler du plastique et des perturbateurs endocriniens, puisque 95 % des poissons étudiés possèdent du plastique dans leur estomac.

Le plastique c’est fantastique !

ironise Fanny Vismara de l’association Plactic Attack qui tente d’agir sur l’ensemble de la chaine, du fabriquant aux distributeurs, jusqu’aux consommateurs. Les expéditions de recherche scientifique, dont celles de Tara Oceans, ont mis en évidence le transport à grande échelle de débris de plastique flottants depuis l'océan Atlantique jusqu'à l'Arctique. Ainsi un septième continent de plastique, s’étale sur une surface équivalente à trois fois celle de la France, au large du Japon et de la Californie, une « autre poubelle de la planète ». La méditerranée n’est pas en reste avec ses 600 000 tonnes de plastiques déversées chaque année.

Nous avons tous été horrifiés de voir ces photos de tortues entravées par un morceau de filet de pêche ou invalidées par une paille dans le nez ou un masque les empêchant de nager[7]. Les images d’estomacs de baleines échouées ou d’oiseaux marins contenant des sacs plastiques, des bouchons de bouteilles, on fait le tour du monde. Pourtant ces macros plastiques dont la taille est supérieure à 25 millimètres ne sont malheureusement que la partie visible de l’iceberg.

 

Car contrairement à une idée répandue, le plastique ne reste pas longtemps en surface : la moitié coule jusqu'au fond et se dégrade en microplastiques (entre 5 millimètres et 1 nanomètre) et en nano plastiques (inférieurs à un nanomètre).Plus alarmant encore, les scientifiques ont observé la présence d’une particule de plastique pour 55 organismes planctoniques que les larves confondent en proie. Le plastique a envahi l’ensemble de la chaîne alimentaire jusqu’à sa base. De ce fait, les humains ingèrent 2 000 micro pièces de plastiques par semaine. Ces 5 grammes représentent l’équivalent d’une carte bleue…

 

Nos vêtements faits majoritairement de polyester, de polyamide, ou d’acrylique se désagrègent en fragments infiniment petits au fil des lavages. Plus de 700 000 microfibres seraient ainsi produites lors d’une machine de 6 kg. Ainsi entre 0,33 et 0,5 million de tonnes de microfibres mettra des centaines, voire des milliers d’années à se dégrader. Quelques innovations apportent cependant une lueur d’espoir. Ainsi Fionn Ferreira, dix-huit ans, vient d’inventer un procédé pour récupérer les petits plastiques. Elle remporte le Google Sciences Award. De son côté, l'ONG « Ocean Cleanup » a conçu une barrière de 600 mètres de long destinée à ramasser les déchets. Le catamaran géant Manta ramasse et trie les plastiques en mer. Mais ces initiatives ne sauraient être suffisantes sans comportements préventifs.

 

Quelques petits gestes pour vous déplastifier et prendre soin de l’océan :

  • Favoriser si possible l’achat en vrac
  • Éviter les produits enveloppés dans du plastique et boycotter les barquettes de polystyrène
  • Faire pression sur les distributeurs et les industriels en dénonçant les produits suremballés
  • Consommer de l’eau filtrée et non en bouteille plastique
  • Acheter si possible des textiles en fibres naturelles
  • Laver le linge moins souvent, à 30 °C et privilégier la lessive liquide moins agressive
  • Utiliser des masques lavables
  • Ramasser les plastiques en vous baladant sur la plage et sensibiliser vos enfants
  • Informer vos proches en douceur
  • Soutenir des associations comme par exemple :
    • Ocean Cleanup : theoceancleanup.com cité précédemment
    • Plastic Attack plasticattackfrance.org : Action de sensibilisation et lobbying citoyen auprès des pouvoirs publics et industriels
    • Plastic Odyssey org : un collectif d'entreprises, d'associations, de chercheurs, d'écoles... qui agissent pour réduire la pollution plastique
    • fr :  pour lutter contre la pollution des océans, notamment par les déchets plastiques
    • org: nettoyer les milieux aquatiques et océans, sensibiliser, mobiliser

 

Au fur et à mesure de l’écriture de ce livre, je me suis rendu compte du gouffre technologique qui sépare ma traversée de la navigation actuelle. Ces trente-cinq années semblent être des siècles. Les cartes marines et les phares ont presque disparu car tant que l’électronique marche, tout cela n’est plus utile. D’ailleurs, de nos jours, même sans connexion internet, n’importe quel téléphone peut repérer votre position, grâce aux 2 000 satellites qui observent la terre. Bientôt avec le projet « Baleines volantes », le fret se fera grâce à des dirigeables, en deux semaines au lieu de deux mois pour faire le tour de la planète. Les temps changent, espérons que cela nous permette de passer de l’hyper consommation à la conservation…

Me serait-il encore possible d’avoir une expérience de la haute mer et de l’immensité aussi intense aujourd’hui ? Non, je dois bien l’accepter et être capable de m’émerveiller de ce qui est encore devant mes yeux, sans regretter le passé.

 

Technodépendance

« Il est hélas devenu évident aujourd'hui que notre technologie a dépassé notre humanité. » Albert Einstein

La technologie a envahi nos vies, désormais connectées. Ces fils à la patte invisibles génèrent une pollution numérique tout aussi discrète. Savez-vous quelle quantité d’énergie consomme l’envoi d’un e-mail avec une pièce jointe ?L’équivalent d’une ampoule basse consommation allumée pendant une heure. Et une ampoule, ça chauffe, tout autant qu’un serveur…

 

Selon le groupe de réflexion The Shift Project, le numérique émet en 2019 4 % des gaz à effet de serre du monde ; avec les milliards d’objets connectés, la consommation énergétique s'accroît de 9 % par an. Elle se répartit en 55 % pour l'usage du numérique et 45 % pour la production des équipements.

Car paradoxalement, plus on dématérialise, plus on utilise de matières. Plus on miniaturise et complexifie les composants, plus on alourdit leur impact sur l'environnement. L’Ademe apporte des conseils forts utiles[8].

Entre 1971 et 2010, les océans ont absorbé 93 % du surplus d’énergie engendré par le réchauffement climatique (les sols en ont absorbé 3 %, la fonte des glaces 3 % et l’atmosphère 1 %). Selon le GIEC, l’augmentation projetée du niveau de la mer pour 2081 - 2100, relativement à la période 1986 - 2005, varie en fonction des scénarios entre 26 à 55 cm et 52 à 98 cm ! 300 millions de personnes sont ainsi directement menacées.[9]

 

Nous aurions tout intérêt à démarrer une petite cure de sobriété numérique. Ainsi, nous pourrions y trouver un avantage non négligeable. Ne pas tous devenir des crétins[10] ! En effet, les anthropologues nous rappellent que chaque fois que l'Humain augmente ses capacités au moyen d’outils, il se départit du pouvoir naturel d'agir de son propre mouvement. L’usage d’outils lui fait fondre sa masse musculaire. Habillé de peaux de bêtes pour se protéger du froid, il perd ses poils. Lorsqu’il se dote du feu pour cuire, son intestin se raccourcit et libère de l’énergie pour faire fonctionner son cerveau.

Mais lorsqu’il soulage son cerveau ???...

Désormais, nous n’avons plus besoin de stocker les informations, de faire des calculs fastidieux, de réfléchir à notre route, d’anticiper le temps qu’il fera, de faire des liens : la technologie le fait pour nous et mieux que nous !

Loin d’être une luddite[11] refusant tout progrès, je m’interroge cependant sur ce que nous avons fait de ce temps disponible que l’opportunité technologique nous offrait. Le temps de travail représente aujourd’hui 11 % du temps éveillé alors qu’il était de 48 % en 1800. Sommes-nous pour autant plus libres dans nos têtes, plus heureux, plus légers dans nos emplois du temps pour profiter des instants d’une vie qui s’est allongée ? Certains y parviennent mais ils sont rares.

Une récente enquête révèle que les Français regardent en moyenne leur smartphone 221 fois par jour ![12] 76 % des 18-24 ans se déclarent inquiets lorsqu’il n’y a plus de réseau. L’illusion de liberté s’est refermée sur les victimes inconscientes ou consentantes. Les jeunes, dont le cerveau est en construction (encore plus que le nôtre), sont devenus dépendants des réseaux sociaux. L’objectif est atteint. L’apocalypse cognitive[13] se profile. Tous les spécialistes qui travaillent sur le cerveau pointent la dépendance aux réseaux sociaux, aux amitiés numériques et aux « like ». 

Nous sommes le fruit d'un conditionnement de masse, d'une accoutumance au plaisir[14], à la paresse et à la jouissance immédiate que les créateurs des réseaux sociaux eux-mêmes dénoncent[15]. Il va nous falloir entamer une sérieuse cure de désintoxication et de déconnexion. Il va nous falloir réduire la voilure[16]

D’ailleurs, pour maintenir l’illusion de participer au monde réel, plus la technologie s’éloigne de la nature, plus elle s’y réfère : jungle numérique, souris, ferme, grappes de serveurs, tweet (qui signifie gazouillis en anglais). Il est peut-être temps de redescendre de notre petit cloud ? À ce stade, la technologie est devenue, non plus une seconde nature, mais bel et bien notre « première nature »[17]. Sans opposer technologie et « nature », il est grand temps de mettre la technologie au service de la sauvegarde du vivant.

 

Quelques petits gestes pour rester connectés au monde du vivant et ne pas mourir idiots :

  • S’équiper léger et éviter les laisses électroniques que sont beaucoup d’objets connectés
  • Réduire les mails, trier et supprimer les mails dans les boîtes de messagerie
  • Préférer les transferts de fichiers en HTML (l’envoi d’un PDF, correspond à une ampoule allumée 24 heures)
  • Pour diviser par 4 l’impact des 3,3 milliards de recherches par jour : taper directement l'adresse d'un site, utiliser l’historique des consultations, créer des favoris dans votre navigateur, limiter le nombre d’onglets ouverts et suivre les conseils proposés par l’Ademe[18].
  • Utiliser des moteurs de recherche engagés pour l’environnement comme Ecosia, Lilo, Ocean Hero
  • Prendre de la distance avec les réseaux sociaux
  • Désactiver les fonctions localisation, Wifi, Bluetooth au maximum
  • Limiter le streaming, préférer l’audio à la vidéo (600 000 heures de vidéo ajoutées chaque jour !)
  • Imprégner les enfants aux merveilles de la nature et leur proposer des activités extérieures stimulantes face à la compétition des réseaux sociaux.

 

« Vos gueules ! » Les Océans demandent le Silence !

« Me too ! » pourraient arguer les océans face au harcèlement que nous imposons à la vie marine toute entière. Rappel des faits : sous l’eau la visibilité est faible. L’ensemble des organismes vivants, des larves coraliennes aux poissons et aux grands mammifères s’orientent, se nourrissant, communiquent et se reproduisent grâce aux signaux sonores. Le bruit émis par les bateaux peut atteindre les 110 décibels (dB), tandis que le bruit de fond naturel de l'océan avoisine les 90 dB. 20 dB.  Ce n’est pas grand-chose…  Sauf que nous entrons dans le champ des basses fréquences, un canal radio, déjà utilisé, par exemple, par les épaulards !

Une étude conduite par le laboratoire d’applications bioacoustiques en Catalogne révèle qua la pollution sonore affecte tout autant les mammifères et poissons que les invertébrés sourds, des grands prédateurs jusqu'au minuscule plancton. Toute la chaîne de la vie océanique souffre du bruit humain, qui entrave les communications et les sensations vitales. Et cette une problématique s’aggrave encore par l’acidification des océans qui diminue l’absorbtion des sons…

Pour réduire notre cacophonie marine, nous pouvons :

  • Rendre le jet ski « has been » en lui préférant la planche à voile, le kite surf, le paddle ou la natation.
  • Passer du hors-bord au voilier, ou passer à l’électrique
  • Acheter du poisson issu des circuits courts et de la pêche locale (ça c’est si je ne vous ai pas convaincu de cesser de manger du poisson ;-)
  • Éviter les produits d’importation. Un jean par exemple parcourt 65 000 k[19]m entre le champ de coton et notre étagère…

Va t’on toucher le fond ?

Le pire est à venir avec l’exploitation minière des fonds marins.
Imaginez ces énormes machines de chantier au fond de l’océan pour récolter des minerais dans un vacarme absolu se propageant sur 60 kms. Cette industrie serait un désastre pour la biodiversité, y compris baleines et dauphins, et pour le climat.

La Norvège joue un double JE…, se présentant comme un défenseur de l'environnement tout en poursuivant des activités fossiles offshore. Les entreprises minières sont prêtes à piller les océans malgré le manque de recherches sur les impacts potentiels, mettant en danger des espèces menacées comme les baleines bleues.

Les débats sont en cours auprès de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM). Plusieurs pays, dont la France et la Nouvelle-Zélande, ont demandé un moratoire de précaution. En 2023, des pays comme le Vanuatu ont rejoint les appels à un moratoire, et Lockheed Martin a retiré ses participations dans des projets miniers.

Greenpeace et d'autres activistes sur leurs Kayaks ont perturbé les activités d'exploration de The Metals Company, soulignant les contradictions de l'AIFM, critiquée pour ses tentatives d'accélérer l'exploitation minière et sa répression des défenseurs de l'environnement.

Nous pouvons agir comme l’exhortent de nombreux scientifiques pour empêcher que soit autorisé ce pillage des fonds marins en exigeant que les états  et fasse respecter un moratoire.

Nous pouvons contre cela :
  • Faire pression et signer des pétitions
  • Réduire notre consommation de pétrole, car c’est au final, pour nous que sont envisagés ces forages…

 

Une victoire historique en faveur des réserves marines

Voici enfin une bonne nouvelle !  Un traité historique sur les océans a été adopté en mars 2023, adopté par les Nations unies, après presque 20 ans de négociations et d’intenses mobilisations des citoyens et citoyennes du monde entier. Il réaffirme la volonté de protéger 30 % des océans du monde d’ici à 2030, et ouvre la voie à la création d’aires marines entièrement ou hautement protégées en “haute mer”.

 

Créer un réseau mondial de réserves marines pour protéger au moins 30 % de la biodiversité des océans, d’ici à 2030 est essentiel. Pourquoi 30 % ? Parce que, selon les scientifiques, c’est le minimum pour permettre aux océans de se régénérer et de maintenir leur bonne santé. Il y va de la nôtre, cela va sans dire…

 

 

 

 

 

Responsables mais pas coupables

 

 

« On ne peut pas être en même temps
responsable et désespéré.
 »
Saint-Exupéry

 

Si certains font preuve de cécité face aux changements, d’autres sont partagés entre l’angoisse face aux défis à relever et la culpabilité ; deux attitudes qui n’aident en rien…

À la lecture du chapitre précédent, peut-être comme beaucoup de militants ou de scientifiques aux avant-postes d’observation avez-vous ressenti ce qu’il est convenu désormais de nommer  de l’éco-anxiété[20]. Un sondage pour Esquire pointe que 72 % des 18-34 ans américains ressentent de l’éco-anxiété. Cet état amène souvent ceux qui en souffrent à chercher à s’informer en permanence et donc à se surexposer aux nouvelles catastrophiques. Véronique Lapaige, la chercheuse qui a développé ce concept, considère pourtant que ce phénomène va nous permettre de faire face, de nous engager, à différents niveaux, face à l'ampleur des impacts environnementaux.

Comme l’évoquait Nietzche[21], la culpabilité nous plombe au point de nous paralyser. Pour rompre avec cette inertie, il nous faut assumer nos responsabilités. Avant de compter sur les autres, il s’agit d’être responsable de nous-mêmes et pour cela mieux comprendre nos atavismes.

« Tout ce qui se meut et possède la vie vous servira de nourriture, je vous donne tout cela au même titre que la verdure et les plantes. Pour vous, soyez féconds, multipliez, pullulez sur la terre et dominez-la » Ancien Testament, le Pentateuque, Genèse 9.

Plus récente, la devise des JO « Plus haut, plus vite, plus fort » est-elle encore valide dans un monde limité ?

Pour être capables de sortir de nos croyances et de nos rails comportementaux, il est nécessaire de se questionner. Que suis-je en tant qu'humain au sein de l’univers ? Quelle est la résultante de mes conditionnements ?

Pour atteindre un stade d'éveil et de lucidité, il nous faudra réviser nos croyances anthropocentriques fondées il y a 2500 ans, alors que la population mondiale avoisinait les 5 millions d’âmes… Il y a là matière à s’inspirer des peuples premiers, trop longtemps considérés comme sous-développés. Qu’il s’agisse des amériendiens Kogis, des Maoris, des Inuits, pour n’en citer que quelques-uns, chacun de ces peuples a su préserver son écosystème en considérant l’espèce humaine non supérieure aux autres. Dans leur vision biocentrique, la vie est un continuum dans lequel il est question de préserver les ressources pour les sept générations suivantes[22]. À ce titre, les Polynésiens déclaraient des zones taboues dans lesquelles celui qui se risquait à pêcher était condamné à mort… Le « kaitiakitanga » chez les Maoris décrit la responsabilité de « gardien » de la nature, transmise de génération en génération, qui devrait être adoptée au niveau mondial.

Aujourd’hui, la planète compte 3,3 milliards de citadins, soit quatre fois plus qu'en 1950. Ces urbains connectés à leurs portables se sont éloignés de la nature, du vivant, du monde marin et encore plus d’eux-mêmes.

D’ailleurs, l’ensemble du système éducatif a mis l’accent sur les « hard skills » permettant de maîtriser les outils, la technique tout en délaissant les « soft skills », l’intelligence émotionnelle, la confiance en soi, la communication[23]… Ces compétences seront pourtant essentielles pour réussir dans un monde en changement. Selon McKinsey, seul un quart des employeurs pensent que les universités classiques préparent correctement au monde de demain. Pôle emploi le confirme : six employeurs sur dix privilégient désormais ces compétences qui seront déterminantes pour notre futur.

Travailler sur soi permet de gagner en confiance en soi, ingrédient indispensable pour oser de nouveaux comportements. Cela offre aussi la possibilité d’exercer une pensée critique pour ne pas subir les modes moutonnières lancées par des influenceurs consuméristes. Cela ouvre la voie de la maîtrise de soi, de ses pulsions d’achat mais aussi alimentaires…

Cette confiance en soi permet aussi de devenir un adulte ancré, centré sur ses valeurs, soigné de ses failles narcissiques, un adulte qui cherche à coopérer plus qu’à dominer les autres ou démontrer son pouvoir par l’accumulation ostensible de richesses.

Cette confiance en soi permet d’oser changer de cap et d’adopter de nouveaux comportements, de comprendre et gérer ses émotions. Ainsi la peur de ne pas y arriver peut nous inciter à prendre du recul et mieux se préparer pour un futur bien différent. La tristesse de voir la nature se dégrader nous invite à lâcher prise avec le passé que nous ne pourrons jamais retrouver. La colère de voir que les choses n’avancent pas suffisamment vite devrait nous inviter à passer positivement à l’action.

 

 

Voici quelques pistes comportementales pour nous, nos enfants et notre planète :

  • Nous lancer dans l’action. C’est un super antidote à la dépression.
  • Regarder ce qui a été réalisé, réparé, amélioré et pas ce qu’il reste faire
  • Agir sans attendre un résultat
  • Ne nous comparer qu’à nous-même : il y en a toujours qui feront mieux ou pire que nous.
  • Ne pas faire la morale aux autres, au risque de perdre notre temps et nos amis…
  • Bien nous entourer. : Notre énergie est celle des cinq personnes que nous côtoyons le plus…
  • Faire mieux d’année en année
  • Nous réjouir en regardant vos progrès et vos réussites. La dopamine soutiendra et multipliera nos efforts sans que cela nous coute.

 

Une dernière réflexion

Certains se posent la question : « Est-il bien raisonnable d’avoir encore des enfants et de faire peser encore un peu plus l’impact humain ? » Paul Watson, engagé corps et âme avec Sea Shepherd, y répond simplement : « Oui, car le futur se construira avec des jeunes conscients et sensibilisés aux enjeux écologiques, donc vos enfants ! » ;-).

La fatalité n’est pas opposable à l’optimisme. Il est fort probable que les prochaines années verront des progrès formidables s’enclencher. Ainsi l'UNESCO a lancé la décennie en faveur de l’océan : dix ans pour sensibiliser aux immenses défis, pour protéger la mer et pour nous permettre d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD).

Charge à nos enfants et petits-enfants, à toi, Matisse qui vient tout juste de débarquer sur terre ainsi qu’à tes copains, de prendre la barre du super tanker pour pouvoir longtemps encore :

  • T’émerveiller des trésors du vivant
  • Faire des rencontres, une occasion de partage
  • De tes doutes, une opportunité pour te questionner
  • De tes peurs, un marchepied pour grandir
  • De tes rêves, le piment de ta vie.

 

 

Bibliographie

De la même auteure (autour des soft skills) :

« Manager par les couleurs » Ed Dunod

« Funny Learning : Former avec les neurosciences ». Ed Dunod

« Vendre avec les couleurs ». Ed Dunod

« Objectif, Satisfaction client » Ed Dunod

« Lean management en couleurs » Ed Dunod

« Le saut de la grenouille : à propos de la résilience »

 

Autour de la mer et de notre futur :

  • Bernard Alonsa, Cécile Guiochon Permaculture humaine ; Bernard Alonsa, Cécile Guiochon
  • Hubert Reeves L’univers, raconté à mes petits-enfants ; Hubert Reeves Seuil
  • Isabelle Delannoy, Dominique Bourg, L’économie symbiotique ; Isabelle Delannoy, Dominique Bourg, Actes Sud
  • Jean-Baptiste Charcot 1927 Colomb vu par un marin ; B. Charcot 1927 Paulsen Éditions
  • Lamya Essemlali Paul Watson, Le combat d’une vie ; Paul Watson, Sea Shepherd, Glénat Lamya Essemlali
  • Mattieu Combe Survivre au péril plastique ; Mattieu Combe
  • Maud Fontenoy « La mer au secours de la terre » Ed Belin
  • Michel Desmurget, La fabrique du crétin digital ; Michel Desmurget, Seuil
  • Nelly Pons Océan plastique ; Nelly Pons Actes Sud
  • Philippe Bihouix, L’âge des low tech ; Philippe Bihouix, Seuil
  • Pierre Rhabi : Vers la sobriété heureuse ; Pierre Rhabi : Actes Sud
  • Pierre Royer, Jean-Baptiste Panafieu. La belle aventure de l’Océan ; Pierre Royer, Jean-Baptiste Panafieu. Dunod
  • Stan Thuret Réduire la voilure Ed Robert Lafond

 

 

Filmographie

Folle de Bassan, Antenne 2, 1985

  • Denis Delestrac Cargo, la face cachée du fret ;
  • Cyril Dion, Mélanie Laurent Demain ;
  • Jeff Orlowski, skyler Gisondon, Kara Hayward  Derrière nos écrans de fumée ;
  • Seaspiracy ; La pêche en question d'après Sea Shepherd

 

[1] Message d’appel au secours international utilisé par les avions et bateaux.

[2] L’IPBES : « La plateforme intergouvernementale scientifique et politique pour la biodiversité et les services écosystémiques » Chiffres 2019.

[3] Tim Wallace, article du New York Time du 12 septembre 2016

[4] Océanographe, fondatrice de « Mission blue » et « Deep Ocean exploration and research »

[5] Voir Seaspiracy dans la filmographie

[6] Par exemple Sea Shepherd Conservation Society engagé dans la protection des baleines.

[7] 1,5 milliards de masques jetés

[8] https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/guide-pratique-face-cachee-numerique.pdf

[9] Etude Climate Central 2019

[10] « La fabrique du crétin digital » Michel Desmurget, Seuil

[11] En référence au mouvement ouvrier anglais en 1811, refusant l’arrivée des premières machines à tisser, les privant de leur travail.

[12] Le point 2524 

[13] Livre au titre éponyme de Gérard Bronner

[14] Moins d’un enfant sur 2 sait résister au fameux test du marshmallow 

[15] Film : Derrière nos écrans de fumée

[16] Du livre éponyme de Stan Thuret

[17] Référence faite à Next Nature

[18] « La face cachée du numérique » ADEME

[19] Source Ademe

[20] Terme désormais inscrit au manuel diagnostique et statistique des maladies mentales (DSM-V).

[21] Seconde dissertation de la Généalogie de la Morale 

[22] Philosophie iroquoise

[23] Critères retenus par exemple pour évaluer les enfants dans le PISA.

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